De quoi se nourrissent les racines de l’arbre de vie ?

Nipmédite Explore – De quoi se nourrissent les racines de l’arbre de vie ?

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Nipmédite Explore - De quoi se nourrissent les racines de l’arbre de vie ?
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Dans le 3e et dernier épisode de cette mini-série de podcasts, nous écoutons Sœur Sylvie nous parler des racines de l’Arbre indispensables au développement de la Vie, suite à ses propos sur le célibat monastique.


Retranscription de l’enseignement de Sœur Sylvie:

Les racines puisent dans le terrain de l’Écriture premièrement. Comment aborder l’Écriture, justement? Faire silence en Soi et invoquer l’Esprit saint. L’invocation de l’Esprit, la culture appropriée du terrain et l’exposition à la lumière du Christ, permettent le miracle de la photosynthèse qui donne vie et joie à l’arbre, c’est-à-dire que la Parole de Dieu contenue dans les Écritures illuminées par L’Esprit, pourra se révéler dans une parole qui me touche personnellement et communautairement et qui est un appel à la conversion et à l’action. Ce qui vivifie l’arbre, c’est la sève de l’Esprit saint qui circule depuis les profondeurs obscures des racines jusqu’aux feuilles exposées à la lumière et réciproquement.

Les racines puisent aussi dans le terrain de la grande tradition monastique transmise dans les écrits des pères de l’Eglise et dans les visites de moines ou moniales issus de toutes les traditions spirituelles et peuvent être de vraies visitations***.

Les racines puisent dans les célébrations, qui sont des lieux de présence du Christ. Comme le dit Jésus, Là où 2 ou 3 sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux [D&A 6/32]. 

Elles puisent aussi dans la prière personnelle où l’on devient toujours plus sensible au murmure de la sève, où on l’invoque avec désir et souffrance, en prenant conscience du bois sec qui entrave sa circulation en nous.

Les racines puisent encore dans l’amitié spirituelle : les rencontres éventuelles avec des frères et sœurs en humanité.

Elles puisent enfin dans le terreau de la vie communautaire qui nous fortifie dans la joie de la communion mais qui nous confronte aussi à nos blessures et difficultés relationnelles. Comme nous avons tous mangé de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, selon le récit du livre de la Genèse dans la Bible, nous nous retrouvons nus devant les autres avec nos hontes et notre envie de nous cacher ou de toute façon de nous défendre de ce sentiment de vulnérabilité. Nous avons besoin que Dieu mette de la paille autour de notre tronc pour nous protéger du froid des relations difficiles, d’une part, mais aussi du froid de la relation difficile avec et envers soi-même****.

Ce qui donne du caractère à la vie d’un arbre, ce sont les saisons et le climat, ils créent la texture du bois et la forme de l’arbre : la foudre peut l’amputer, une bonne humidité chaude l’élancer, les insectes le lacérer etc. La consistance du bois de l’arbre en est affectée ainsi que sa forme. Il en est de même pour nous.

Une enfance heureuse dans une famille solide peut former un tronc fort, comme le contraire peut affecter le jeune arbre… Une adolescence perturbée donnera un feuillage ébouriffé, les coups de la vie peuvent couper des branches maîtresses ou tordre la verticalité.

Quand je me promène dans les bois alentour [ndlr: à Bose/IT], qui sont des bois mal entretenus et mal exploités, je cherche toujours à voir les arbres « miracles ». Ce sont ces plantes qui ont fait preuve d’une résilience particulière et qui permettent à la sève d’irriguer des zones dévastées pour y mettre du vert contre toute espérance. Souvent l’aspect de l’arbre est vraiment malheureux, mais sa force de vie n’en est que plus évidente et bouleversante. Pour moi, ce sont toujours des leçons de vie et j’irais même jusqu’à dire une Parole du Seigneur parfois.

La miséricorde de Dieu ne s’arrête jamais à nos blessures, elle peut les traverser et les irriguer, mais mon expérience c’est que les blessures laissent leur trace, les arbres en témoignent.

C’est le Christ qui prend en charge notre misère dans sa miséricorde. C’est Lui qui renouvelle sans cesse sa confiance et sa foi en nous, c’est Lui qui s’abaisse, car nous sommes des petits et c’est lui qui nous élève à la hauteur de son humanité, c’est Lui qui nous accorde son pardon pour que nous puissions pardonner.

Demeurer dans la miséricorde de Dieu implique une lutte et une vigilance sur nous-mêmes. 

Qu’est-ce que cela veut dire? Nous avons des mécanismes de défense par rapport à notre souffrance profonde qui nous enferment dans une auto-suffisance, dans une auto-justification et dans un auto-jugement. La lutte ‘spirituelle’, c’est justement s’ouvrir à l’’Esprit’. Accueilli en nous, son travail peut amener à percevoir que la présence divine sauve ce que nous jugeons être l’insauvable en nous. L’Esprit saint irrigue le bois mort en nous, accepte « l’inacceptable » en nous. Il nous demande de nous abandonner à sa confiance et à son pardon pour nous réconcilier avec nous-mêmes, avec les autres et avec Dieu et accomplir ainsi, sans le vouloir de manière volontariste ou moraliste, mais plutôt avec un désir amoureux, le grand commandement de l’amour qui est le suc de la volonté du Père, qui attend que l’amour s’épanouisse dans notre humanité, qu’il y trouve sa demeure. C’est bien dans la demeure de notre humanité que nous rencontrons le Christ. La vie de notre arbre c’est d’accueillir et d’intégrer dans les fibres de son bois la miséricorde du Christ pour qu’elle devienne notre sève, sa sève dans la nôtre. 

Rassurons-nous : il y faut plus que toute une vie. Dans cette vie nous faisons pousser une branche nouvelle dont les feuilles sont comme celles de l’arbre Christ et souvent, une chèvre vient la manger aussitôt, mais peu importe, Dieu l’a vu, Dieu le sait, il ne prétend rien de nous, c’est nous qui prétendons. Lui, il nous invite à la vie, à toujours recommencer après l’échec, à renouveler notre confiance dans sa miséricorde sans nous désespérer, c’est une façon de nous détacher de nous-même, de « perdre » notre vie pour la « trouver » en Lui. On peut aussi comprendre les paroles de Jésus dans ce sens, lorsqu’il dit: car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera.

Il s’agit en quelque sorte de lui laisser la chance de pouvoir nous justifier, de nous rendre ajustés à lui au sein même de nos échecs. St-Paul témoigne de sa propre expérience: Alors même que nous sommes ennemis de Dieu, pécheurs, Dieu nous réconcilie avec Lui par Son Fils (J’ai mis la citation au présent pour la rendre plus évidente).

Comme l’arbre se tend vers la lumière du ciel, nous nous tendons nous aussi. Nos branches et notre feuillage s’ouvrent à cette lumière pour en recevoir la vie, une vie qui saura traverser la mort grâce à Celui qui, je cite: “ayant commencé en nous une œuvre excellente la portera à son accomplissement.” [Phil 1/6]. Car le rêve de Dieu pour chacun de nous est de devenir un arbre à la stature de l’Arbre de Vie, incarné par Jésus Christ.


Épilogue et autres notes:

Arrivé au terme de cette mini-série de podcasts, retrouvez toutes les informations en français sur la communauté de moines vivant à Bose (IT) en suivant ce lien.

*** Ce passage de la Bible raconte la rencontre entre deux femmes enceintes qui reconnaissent réciproquement la présence et le don de Dieu en elles : « En ces jours-là, Marie partit et se rendit en hâte vers le haut pays, dans une ville de Judée. Elle entra chez Zacharie et salua Élisabeth. Or, dès qu’Élisabeth eut entendu la salutation de Marie, l’enfant tressaillit dans son sein et Élisabeth fut remplie du Saint Esprit. Alors elle poussa un grand cri et dit : « Tu es bénie entre les femmes, et béni le fruit de son sein ! Et comment m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne à moi ? Car, vois-tu, dès l’instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en mon sein. Oui, bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur (Lc 1:39-45) ! » »

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